Tout a commencé il y a longtemps, bien longtemps sur un ancien champ de bataille, quelque part dans le Vieux Monde. La bataille se termina dans un horrible bain de sang et les deux camps s'effondrèrent sur le terrain gorgé de sang, sous le vol des vautours. La capricieuse Dame Victoire restait insaisissable pour quiconque. L'épuisement mutuel conduit à une trève durant laquelle les chefs des deux camps tentèrent de parlementer.
Pendant que leurs chefs discutaient les soldats s'écroulèrent sur place, profitant du répit qui interrompait le carnage. Mungk, le chef d'une petite bande d'orques était assis à côté de son premier sergent et se livrait à son passe-temps favori, l'exhumation de crottes de nez. Après avoir remporté cette épreuve passionnante gràce à une manoeuvre adroite partant du haut vers le bas, Mungk expédia d'une pichenette la petite boule verdatre au loin. L'orque se dressa, se demandant quand ces vaines palabres prendraient fin afin de pouvoir retourner se marrer et massacrer consciencieusement. Il observa le champ de bataille, souriant béatement à la vue d'une pile de cadavres nains. Ils avaient été tués dans une petite dépression en forme de bol. A l'extrémité sud de ce lieu, se tenait un étrange dôme d'argent, sans doute une autre de ces anciennes constructions. C'était contre ce dôme que Mungk reposait sa tête à cet instant.
Agacé de n'avoir que ses dents à sucer et poussé par un fort grondement de son ventre, il commença à gratter le sol détrempé dans l'espoir d'y trouver un ou deux vers de terre bien juteux à grignoter. Ses griffes émoussées par la bataille heurtèrent quelque chose de dur et lisse. Il tira, mais en vain, Il gratta : rien ne se passa. Puis il poussa. Quelque chose s'enfonça, quelque chose d'autre cliqua et un troisième quelque chose fit entendre un puissant sifflement. Ce troisième quelque chose était la paroi d'un antique bâtiment qui glissa vers le haut, laissant s'échapper de l'intérieur obscur un air sec et vicié.
Mungk, qui aurait eu de sérieux problèmes avec la lingère s'il avait porté une forme quelconque de sous-vêtements, regarda avec des yeux ronds le hall brillant qui était maintenant visible à l'intérieur du dôme. D'étranges armures en décoraient les murs, de bizarres mosaïques en recouvraient le sol et en son milieu, posé sur un immense piédestal, se tenait un énorme livre...
Les chefs des armées, à l'annonce de l'étrange découverte de l'orque, ajournèrent leurs négociations pour ce nouveau mystère. Comme aucun des deux généraux ne savait lire, ils furent incapables de déterminer autre chose que le fait que le bâtiment était un temple antique. Des messagers furent envoyés d'urgence à la recherche d'érudits capables de déchiffrer les secrets que recelait le dôme. Finalement un nain à moitié aveugle fut amené et présenté comme étant expert dans toutes les langues du monde, vivantes ou mortes. Le livre posé sous son nez constellé de verrues, le nain s'assit par terre, les jambes croisées et se plongea dans la lecture du mystérieux grimoire.
Trois jours passèrent durant lesquels le nain bougea à peine de son emplacement. Enfin, il s'apprêta à faire son rapport. Un podium fut dressé à la hâte devant le temple d'argent et l'individu rabougri y fut hissé pour annoncer ses découvertes à la foule assemblée devant lui.
"Ce livre", chevrota l'antique prophète en clignant des yeux, "semble être le texte religieux d'un groupe de guerriers qui venaient d'une terre appelée Amorique. Il est dédié au dieu perdu Enéfel. Les grands prêtres des diverses sectes de cette divinité, connus sous le nom de Coaches, menaient leurs bandes de guerriers dans de grandes arènes et tentaient de s'exterminer. Cependant le but n'était pas la violence pour la violence. Non ! En vérité, il y avait une grande signification rituelle !"
Il y eut un murmure alors que la foule tentait d'imaginer un concept aussi étranger. Le nain pousuivit : "Une vessie de cochon était gonflée et amenée ou lancée d'un bout à l'autre de l'arène, dans le but de, heu... marquer. Réussir à déposer la vessie au delà de la dernière ligne ennemie donnait à la secte un certain nombre de choses appelées points. A la fin, la secte qui avait le plus de points avait gagné. Apparemment, il n'y avait pas besoin de massacrer tous les adversaires, bien que les coaches semblent avoir encouragé cette pratique. Le livre indique que le chiffre sacré de Enéfel était onze, et que donc seuls onze guerriers de chaque camp étaient autorisés sur le champ de bataille en même temps.
A cette annonce, il y eut un grand mouvement dans les rangs gobelins, quand ceux-ci enlevèrent leurs brodequins dans une tentative déseepérée de réaliser ce qu'était le nombre onze. Comme de coutume, cela dégénéra en bagarre après qu'un gob eu découvert quelle bonne blague cela pouvait être que de garder ses bottes ferrées pour mieux marcher sur le pieds nus de ses copains. Ignorant les fréquents hurlement de douleur, le nain poursuivit.
"Ceci ne veut pas dire qu'une secte, ou équipe comme elles étaient appelées, ne comptaient que onze membres. Les guerriers pouvaient entrer ou sortir à volonté aussi longtemps que le chiffre sacré n'était pas dépassé. Il était également permis de frapper ses adversaires à tout moment, à condition que ce ne fut point avec une arme ! Enéfel affirmait que le corps d'un guerrier devait être sa seule arme et, bien qu'il acceptât les armures, que toutes les armes devaient être interdites. Il est écrit que l'arène dans laquelle se déroulaient cs conflits était un terrain rectangulaire, à l'intérieur d'un immense bol !"
Tous les yeux se tournèrent et observèrent la forme du champ sur lequel ils s'étaient rassemblés, et où d'imposantes escadrilles de vautours au ventre plein tentaient péniblement de reprendre l'air.
"Il me semble", continua le nain d'une voix forte pour regagner l'attention du public, "qu'Enéfel a vu notre dilemme et tente de le résoudre. je suggère que chaque camp forme une équipe et que nos problèmes soient ainsi résolus. Un murmure d'approbation parcourut la foule et devint rapidement un tonnerre d'exclamation. A l'exception, bien sûr, de l'endroit où se tenaient les gobelins, qui en étaient encore à expérimenter les nouvelles et passionnantes possibilités de l'activité consistant à s'écraser les pieds !
Ainsi eu lieu le premier match de ce qui devint rapidement connu sous le nom de Football Amoricain d'Enéfel. Une vessie de cochon fut gonflée, à la grande consternation de ce dernier. les armures du temple furent récupérées et distribuées aux guerriers choisis par les deux camps. Les équipes s'alignèrent, un chamane "arbitre" revêtu pour l'occasion d'une peau de zèbre fraîchement dépecé, souffla dans un cor de guerre et la partie commença.
Il n'y avait pas à proprement parler de terrain, pas de lignes, très peu de règles et à ce jour personne ne se rappelle qui a gagné. Cependant, il y a eu une bonne dose de carnage et tout le monde reconnut qu'on avait bien rigolé. La bataille fut oubliée et les armées se séparèrent pour annoncer cette nouvelle excitante à leurs pays respectifs, où chaque tribu s'empressa d'aligner une équipe.
Pendant ce temps, ceux qui étaient restés pour nettoyer découvrirent une étrange surface verte sous la boue sanglante du champ de bataille : une surface présentant des symboles et des lignes étranges. Enfin le terrain sacré dont le Livre parlait fut mis à jour.Le prophète nain, qui avait adopté le nom de Commissaire Sacré Roze-El d'après le nom d'un prêtre de haut rang mentionné dans le Livre, offrit une prière à Enéfel et entreprit d'organiser la première rencontre entre sectes. Son esprit bouillonnait de plans pour l'avenir, plans qui culmineraient dans des rencontres officielles entre les sectes les plus coriaces, en des offrandes en l'honneur du grand dieu, le Blood Bowl !